La sanction du défaut de transmission à l’expert judiciaire du rapport médical
2EME CIV. , 6 JUIN 2024, POURVOI N° 22-15.932, PUBLIE
Afin de garantir un juste équilibre entre le droit de la victime au respect du secret médical et le principe du contradictoire à l’égard de l’employeur, la loi n°2016-1547 du 18 novembre 2016, l’ordonnance n°2018-358 du 16 mai 2018, et les différents décrets d’application ont organisé, tant au stade amiable devant la commission médicale de recours amiable (article L. 142-6) qu’au stade contentieux lorsqu’une expertise judiciaire est ordonnée (article L. 142-10), une procédure de transmission du rapport médical, détenu par le praticien-conseil du service du contrôle médical, et dont le contenu est défini à l’article R. 142-1 A, V.
La Cour de cassation a jugé, dans la continuité de l’avis rendu le 17 juin 2021(Avis de la Cour de cassation, 17 juin 2021, n° 21-70.007, publié) que l’absence de transmission, au stade amiable, du rapport médical au médecin mandaté par l’employeur n’entraîne pas l’inopposabilité, à l’égard de ce dernier, de la décision de prise en charge par la caisse primaire d’assurance maladie des soins et arrêts de travail prescrits jusqu’à la date de consolidation ou guérison (2e Civ., 11 janvier 2024, pourvoi n° 21-15.939, publié).
Au cas présent, la deuxième chambre civile de la Cour de cassation était saisie de la question de la sanction du défaut de transmission du rapport médical à l’expert judiciaire.
Contestant l’imputabilité des arrêts de travail et des soins à l’accident du travail d’un de ses salariés, un employeur a saisi une juridiction chargée du contentieux de la sécurité sociale qui a ordonné une expertise. Ayant constaté que le rapport médical n’avait pas été transmis à l’expert, la juridiction a déclaré les arrêts de travail et soins inopposables à l’employeur au motif que la caisse primaire d’assurance maladie n’avait pas permis le respect des principes de la contradiction et de l’égalité des armes entre les parties, nécessaires à la mise en oeuvre d’un procès équitable.
La Cour de cassation censure cette motivation et juge, au visa de l’article L. 142-10 du code de la sécurité sociale, que le défaut de transmission à l’expert désigné par la juridiction du rapport médical par le praticien-conseil du service du contrôle médical de la caisse primaire d’assurance maladie, n’est pas sanctionné par l’inopposabilité de la décision de prise en charge des soins et arrêts de travail prescrits.
En revanche, il appartient à la juridiction de tirer du défaut de communication de ce rapport à l’expert toute conséquence de droit quant au bien-fondé de la prise en charge, au titre de la législation professionnelle, des soins et arrêts de travail prescrits.
Il se déduit de cet arrêt que si l’inopposabilité à l’employeur de la décision prise par la caisse n’est pas la sanction adaptée à l’irrégularité constatée, pour autant un tel défaut de communication ne peut être dépourvu de conséquence. Le juge saisi doit statuer sur le fond de la demande et, au vu des éléments de preuve dont il dispose, fixer la date à compter de laquelle il n’est plus établi que les soins et arrêts de travail étaient imputables à l’accident du travail.
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